Vaux-le-Vicomte - l'exceptionnelle demeure

Cette signature¹ est d'abord remarquable par son inversion.

Le fait de commencer par l’adjectif plutôt que par le substantif produit plusieurs effets. En tout cas sur moi.

En attirant l’attention sur l’adjectif, en le mettant ainsi en valeur, cela crée une attente et suscite ma curiosité : une sorte de suspense syntaxique.

On découvre d’abord une qualité forte (« exceptionnelle »), même prétentieuse mais sans savoir à quoi elle s’applique — le substantif vient après. Cela donne plus d’impact au mot « demeure » quand il arrive.

En mettant en avant l’adjectif, on donne également à la demeure en question un caractère presque mythique ou symbolique, comme si elle incarnait l’exception elle-même.

L’inversion est très rarement utilisée à l’oral, elle donne un style littéraire et emphatique qui en limite l’usage. Peu de signatures de marque d’ailleurs utilisent l’inversion².

Il y a ensuite le terme demeure. Exceptionnelle demeure sonne presque comme un oxymore, tellement demeure est modeste. On a tous en tête l’expression « une humble demeure ».

Demeure a l’autre avantage de susciter la curiosité sur ceux ou celles qui habitent ou ont habité le lieu plutôt que le lieu lui-même.

En l’occurrence, celui qui l’habita le premier, Nicolas Fouquet était le ministre des finances du roi soleil. Celui-ci n’en a d’ailleurs profité que très brièvement : en 1661, peu après avoir organisé une célèbre fête en l’honneur de Louis XIV au château, il est arrêté sur ordre du roi, jaloux de son faste. Fouquet passera le reste de sa vie dans une autre demeure : la prison. Exceptionnel, non ?

• Agence Babel
• Parmi les quelques rares signatures utilisant l'inversion : Tediber, l’incroyable matelas