Aigle - Pour la réintroduction de l'homme dans la nature
Peu de slogans donnent ce sentiment d'être un peu plus heureux, un peu moins bête après qu'on les a découverts furtivement dans le métro au détour d'une affiche ou en écoutant un spot radio devant son café. La dernière signature d’Aigle fait partie de celles qui provoquent des ondes de plaisir dans le cerveau.
Chacun connaît les tentatives parfois burlesques et fortement médiatisées pour réintroduire ces dernières années le lynx dans les Vosges, le loup dans Le Mercantour¹ , l’ours dans les Pyrénées.
Aux sceptiques on rappellera qu’on déplore rien que chez les oiseaux 179 espèces disparues à jamais de nos cieux dont le Râle de Tahiti ou le Pigeon de la Réunion. Efforts dérisoires quant on les compare aux attaques massives menées au vingtième siècle par l’homme contre sa planète ou, un siècle plus tôt, à la rage d’éradiquer qui habitait nos ancêtres. Mais efforts méritoires car il faut bien commencer par quelque chose.
C’est donc avec sympathie que notre cerveau d’homo sapiens coupable de meurtres à répétition envers les espèces inférieures découvre le nouveau credo de la marque de vêtements Aigle : Pour la réintroduction de l’homme dans la nature.
L’effet jubilatoire est immédiat, ses causes faciles à identifier : une tournure très classique presque banale qui résonne plus comme la devise militante d’une association citoyenne mais surtout cette substitution entre « espèce en danger » et « homme » qui fait le travail d’interpellation : l’homme, tout comme certains animaux en danger, serait donc aussi à protéger de la civilisation urbaine et industrielle qu’il a lui-même créée et sa réinsertion dans la nature une urgence pour qu’il soit à nouveau relié à la terre, l’air, la forêt, le cosmos dont il est issu.
Sans parler que cette expression renvoie également à une autre conséquence de notre société industrielle : la désertification des campagnes, de la montagne.
Pour la réinsertion de l’homme dans la nature. Qui ne pourrait souscrire à une telle invitation ?
Après la jubilation, vient la connivence : Aigle nous signifie qu'elle participe à ce grand mouvement d’interrogation sur notre dette envers la nature. Mais elle le fait avec humour, un humour que les pessimistes jugeront un peu désespéré et qui n’est pas sans rappeler la récente campagne de Diesel Global Warming Ready.
Mais contrairement à la marque de jeans, on ne pourra pas faire à Aigle de procès en récupération gratuite. La connivence avec la marque se fait d’autant plus facilement que la marque dont on rappellera au passage que le nom même est celui d’une espèce sinon en voie de disparition tout au moins fortement décimée, fabrique des vêtements « outdoor » précisément faits pour vivre au plus près de la nature. La marque a d’ailleurs affirmé avec constance à travers ses signatures son attachement au même concept : Vivre grandeur nature 1991; La nature vous aime en Aigle 1994-2004; Vêtements pour la planète 2004– 2007.
La campagne² en annonces presse vient avec brio mettre en scène la signature : elle réintroduit au sens littéral du terme des humains en lieu et place de chauve-souris, de singes, d’ours polaires. Ces hommes habillés en Aigle se fondent visuellement dans la nature. L’image renforce les mots. Travail de pro.
Jubilation est placé très haut dans mon panthéon personnel des critères qui déterminent la performance d'une signature.
Les marques ne se rendent pas assez compte de la reconnaissance durable qu'ils obtiennent des gens lorsque celles-ci les traitent non pas comme de simples badauds des marques mais comme des êtres pensants, cultivés, spirituels. Comme vous et moi.
La nouvelle signature d’Aigle est jubilatoire même si notre sourire sur les questions d’environnement devient de plus en plus jaune.
* Au début du XIXe siècle, il y avait 5000 loups en France; ils ne sont plus que 1000 vers 1890. En 1930, seuls subsistent une ou deux dizaines d’« individus aux mœurs discrètes » in Rapport d’enquête de l’Assemblée nationale sur « la présence du loup en France et l’exercice du pastoralisme dans les zones de montagne », sous la direction de Christian Estrosi, 2002-2003
* Agence BETC Euro RSCG
Commentaires