Smart - Ceux qui ne l'aiment pas n'existent pas Smart - Ceux qui ne l'aiment pas n'existent pas
Publié le 15 mars 2007 par Jean-Luc Gronner

Smart - Ceux qui ne l'aiment pas n'existent pas

Logotype Smart

La Smart qui est à peine une voiture a vécu des épisodes mouvementés. Ce claim, véritable cas d'école, lui ouvrira-t-il un nouvel avenir ?

Tout le monde aime la nouvelle Smart. Joli claim n'est-ce pas ?

De quoi faire un film canon mettant en scène des people utilisant avec bonheur la petite dernière de Smart. Identification assurée. Succès garanti.

Vous n'y êtes pas du tout.

Lorsqu'on est une agence créative qui se respecte¹, qu'on gère l'un des plus petits budgets automobiles qui soit, on a des devoirs.

On ne peut guère se contenter d'une expression aussi « droite » et « déceptive » que Tout le monde aime la nouvelle Smart. Cette phrase devra donc se contenter de n'être que ce qu'elle est : l'expression du brief. Charge aux créatifs de twister, tordre, torturer les mots pour en extraire une idée.

Vous connaissez parmi vos proches quelqu'un qui conduit une Smart ? Même une ancienne Smart ?

Sachez-le, c'est un fidèle de chez fidèle. Entendez qu'il fait partie des gens qui, lorsqu'ils changent de voiture, sont 80% à acheter... une autre Smart. Des accros qui en sont jusqu'à renouveler leur Smart 6 fois ! Des personnes attachantes et attachées à leur marque avec laquelle ils ont une relation très émotionnelle, capables de faire Paris-Deauville en Smart sans sourciller.

Bref de quoi creuser cette connivence forte avec la marque plutôt que chercher le plus produit, le truc qui va économiser 6% de CO2 ou qui va permettre de freiner 1 seconde plus tôt.

Cela tombe d'ailleurs assez bien car la nouvelle Smart – en fait la version optimisée de son modèle historique - gomme beaucoup des problèmes produits constatés dans sa précédente version : espace intérieur retravaillé, comportement routier revisité, nouvelle motorisation, tenue de route améliorée : tout bien quoi !

Raison de plus pour ne pas en parler. Pas tout de suite en tout cas.

Dès lors qu'il faut s'appuyer sur la connivence, que la conception du produit va séduire à coup sûr, plus d'hésitation, la stratégie est bonne : tout le monde va aimer la nouvelle Smart² . Reste à le dire mieux. Beaucoup mieux.

C'est en adoptant une figure de style un peu crétine - la double négation - que les créatifs³ trouveront le bijou... et le bonheur.

Un bonheur trouvé facilement, confessent avec sincérité, les créatifs, l'expression retenue étant la première idée qu'ils aient eue. Ceux qui ne l'aiment pas n'existent pas.

Pour une signature de marque appelée à durer des années, c'est un peu juste*⁴. Pour relancer une marque qui s'essouffle, qui a vécu des débuts difficiles, qui bénéficie d'un capital de marque intact et d'un produit repensé, c'est impeccable.<

En mathématiques moins x moins égale plus. En publicité, la double négation n'est pas équivalente à l'expression positive. Elle est nettement plus drôle que cette dernière.

L'humour qui exagère en excluant jusqu'à l'existence d'une seule personne qui n'aimerait pas la Smart est bien sûr le ressort qui rend intéressant une expression qui dans sa version positive reste banale et peu crédible.

En retournant l'expression, les créatifs retournent donc la salle en leur faveur. On pense au célèbre dicton What you don't know can't hurt you repris par Snoopy à la signification toute aussi improbable, ou à une ribambelle de signatures et de claims utilisant cette même forme de rhétorique et qui ont fonctionné, même sans humour : Pas de FT, pas de commentaire (Financial Times), Pas de cigarette russe, pas de dessert (Delacre)...

Et puis, il y a l'essentiel. Le bon claim est celui qui amène tout rôti l'idée créative. Or le n'existent pas recèle – c'est tellement évident après coup – l'idée. Il suffit de prendre au mot littéralement le claim et de mettre en scène des gens qui n'existent réellement pas. Dans la douzaine de scripts pondus par les créatifs, l'agence et l'annonceur se contenteront de démarrer l'affaire par le Père Noël pas franchement accro de la nouvelle Smart, de Roswell l'extraterrestre pas très fan non plus, ni les zombies, ni les sirènes, ni les nains de jardins.

Cela fait du monde mais assez peu somme toute par rapport à tous les autres acheteurs potentiels de Smart !

Le petit format 10 secondes achevant pour cette petite voiture, avec ce petit budget de trancher joyeusement avec les codes habituels de la publicité automobile.

Certains dircoms qui ont refusé à leur agence un claim ou une signature sous le seul prétexte qu'elle était négative devraient inscrire ce claim au-dessus de leur bureau.

  • Agence CLM BBDO
  • Il faut d'ailleurs l'espérer pour cette marque sympathique qui a perdu 22 % de part de marché en Europe l'année dernière. Source L'Expansion 16/1/2007
  • Concepteur rédacteur : Léo Berne ; Directeur artistique : David Bertram
  • La signature de marque « Open your mind » qui avait succédé à la signature historique de lancement « Reduce to the max » est jugée par l'agence très banalisée. Elle a donc disparu corps et biens, en tout cas dans la campagne publicitaire.

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